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%u00ab Penser, sculpter, habiter %u00bbChaque fois qu'un sculpteur fa%u00e7onne une pi%u00e8ce, c'est comme si l'univers se recr%u00e9ait. La mati%u00e8re prend forme pour donner naissance %u00e0 une nouvelle vie. D%u00e8s lors, la pi%u00e8ce se tient d'elle-m%u00eame, avec une grande dignit%u00e9, bien qu'elle doive tout %u00e0 son cr%u00e9ateur. Cependant, chaque sculpteur a sa propre mani%u00e8re de donner vie, ainsi que de tracer son chemin dans le monde de l'art.Ariel Elizondo a parcouru un long chemin pour en arriver l%u00e0, m%u00eame si chacun de ses pas dans le monde de la construction lui a permis de mieux comprendre les possibilit%u00e9s des mat%u00e9riaux qu'il utilise. Le passage des grandes constructions au d%u00e9veloppement d%u2019%u0153uvres personnelles suppose un processus de distillation des formes, tout en permettant de voir une concentration de tout son travail ant%u00e9rieur. Autrement dit, dans chacune de ses sculptures, on retrouve la rigueur de celui qui entreprend de construire une cath%u00e9drale, de la m%u00eame mani%u00e8re que dans la d%u00e9licatesse de ses travaux architecturaux se trouve la graine de son travail sculptural. Son parcours professionnel l'a transform%u00e9 en un expert de la transformation de l'%u00e9l%u00e9ment le plus dur, comme la terre, en l'espace le plus habitable. En g%u00e9n%u00e9ral, nous ne prenons pas le temps d'appr%u00e9cier le sol que nous foulons, mais de nombreuses pi%u00e8ces de cet auteur sont de v%u00e9ritables %u0153uvres d'art qui pourraient %u00eatre accroch%u00e9es dans un mus%u00e9e si elles pouvaient %u00eatre mises %u00e0 plat et encadr%u00e9es.Dans son travail purement artistique, il est %u00e9mouvant de le voir laisser la pierre %u00eatre ce qu'elle est, comme le dirait Heidegger, en nous d%u00e9voilant ce que signifie la terre. Le philosophe allemand consid%u00e9rait que seule l'oeuvre d'art pouvait r%u00e9v%u00e9ler ce que la terre cachait (2010). Ainsi, l'artiste est le transmetteur de ce qui reste habituellement voil%u00e9. Comme le d%u00e9crit Heidegger, ce sculpteur %u00e9coute ce que la terre a %u00e0 dire, restant %u00e0 l'%u00e9coute de ce que les pierres ont %u00e0 dire. Il %u00e9tablit un dialogue, exerce une caresse et demande la permission de l'utiliser. Comme le berger qui conna%u00eet son troupeau, il conna%u00eet ses pierres : il sait d'o%u00f9 elles viennent, peut-%u00eatre des restes d'une construction, peut-%u00eatre de sa propre carri%u00e8re, et il les appelle par leur nom : granit, quartzite, calcaire, etc.63